La jouissance avec les semblants
Ce livre réunit des articles et des travaux adressés au départ à des psychanalystes ; il reprend l’élaboration que fait Lacan du rapport entre les sexes et l’articulation de la jouissance et des semblants autour de cette question. L’importance accordée aujourd’hui aux gender studies et les débats qui traversent les sociétés contemporaines ont amené l’auteure à confronter la recherche de Lacan aux critiques que Judith Butler lui adresse nommément – critiques que l’apport théorique de celui-ci déplace de façon décisive. Doit-on dire que la psychanalyse soutient la domination ancestrale « hétéronormée » qui instaurerait un ordre « prétendument symbolique » en réitérant des modèles appartenant à des stéréotypes ? Peut-on accepter de lire que Lacan privilégierait indûment le phallus dont le lien avec le pénis – qualifié par Judith Butler de « yahvé hébraïque » –, serait par lui élidé ?
La non-différence des sexes dans l’inconscient, leur « bipartition à chaque instant fuyante » font objection à cette charge contre Lacan. Comment, au-delà des identités socialement revendiquées, penser ce qu’il nomme des « options, dites d’identifications sexuées » ? Avec les formules de la sexuation que Lacan élabore, il s’agit de jouissances indépendantes de l’anatomie mais rigoureusement distinctes dans leur articulation aux semblants. À ce point de son enseignement, Lacan a exploré la question de l’incommensurable du rapport entre les sexes. Que Lacan ait desserré la psychanalyse de l’idéologie œdipienne et de son « familialisme délirant », pluralisé les Noms-du-Père, exploré une jouissance dite « pas toute » phallique, n’empêche pas que les jouissances – masculine, féminine, hétéro, homo, bi, trans, queer, ou intersexuées – ne soient jamais que des jouissances « en obstacle » entre le ou les partenaires ; la sexualité ne fonde aucun rapport qui s’inscrive. Le réel est intouché.
In fine, à l’encontre de toutes les reconfigurations socialement construites qu’exalte Judith Butler, le dernier enseignement de Lacan insiste sur le corps où s’inscrit la marque de la vie ouverte à la jouissance et rétive au sens. Le corps ne peut être ouvert à toute nomination performative possible, comme le soutient Judith Butler. Le singulier de ce « foyer brûlant » de la jouissance est sans rapport direct avec les signes du sexué ni avec les multiples nominations de genre. Personne ne peut subjectiver de façon adéquate sa position sexuée.
Sommaire
Introduction
La jouissance et les semblants
Rapports entre les sexes
L’imaginaire, le symbolique et le semblant
Prologue
Les sexes et le semblant
Semblant et image phallique
Les « deux phallus »
Phallus et semblant
Les identifications sexuées
Le semblant phallus et ses limites
Prologue
Fétichisme et « érotomanie »
L’objet a
Semblants entre symbolique et réel
Prologue
Semblant et discours
Semblant, jouissance et vérité
Passion transexualiste
Le tournant d’Encore. Les formules de la sexuation
Prologue
La fonction phallique et les formules de la sexuation dans les Séminaires XVIII, XIX et XX
Rapport entre les sexes
Parcours de l’objet a
Prologue
Imaginaire. Symbolique. Réel
Semblant – le triangle d’Encore
« Il n’y a pas de rapport sexuel »
Prologue
Phallus et non-rapport sexuel
Les femmes et le réel du non-rapport sexuel
Il n’y a pas de rapport sexuel
Yadl’un
Rapport sexuel et sinthome
Le corps parlant
Prologue
Lacan, la linguistique et la linguisterie
Saussure, Jakobson et Lacan
L’inconscient structuré comme un langage
Lalangue
Effet de trou
Parlêtre et inconscient
De l’inconscient freudien à l’inconscient lacanien
L’invention du parlêtre
Le corps parlant
Quel rapport le sujet entretient-il à son corps ?
Le corps parlant
Le corps dans la civilisation
Le corps de l’autre
Le phallus, résidu qui vérifie
Mise à plat du phallus
Le phallus fait parler
Fonction phallique et jouissance sexuelle
Le phallus, résidu qui ne parle pas
La passe
Trous et restes
Savoir troué, corps troué
Les deux ombilics
Pulsion, enfer, image
L’analyse et la passe
Le trauma : de l’énigme au résidu
Mythes du traumatisme
Béance du désir de l’autre, opacité de sa propre vie
Traumatisme du malentendu
Et l’analyste ?
Entre hommes et femmes
Prologue
« Tu es ma femme… tu es mon époux »
« Ce qu’il ya sous un mariage »
Nous ne vieillirons pas ensemble
Qu’en dit la psychanalyse ? Dans l’imaginaire. Dans le symbolique. Quand le lien bute sur le réel du sexe. Et l’enfant ?
L’envers de la fiction mâle
Modulations féminines
Corps de femmes, lieux de jouissance
Corps symptôme ou « symptôme de symptôme » ?
L’autre jouissance et « le mystère du corps parlant »
Les femmes, la liberté et la solitude
Liberté à l’égard des semblants
Le partenaire-solitude
Parodies de jouissance
Corps ou « hors-corps » ?
Une autre parodie ?
Croire la femme ou croire à une femme
Abus sexuels en famille
Viol et passage à l’acte
Inceste générationnel
Quelle jouissance ? Métaphore ou métonymie de la jouissance
Les arts de la jouissance
Prologue
Puissance des semblants : pseudolus le truqueur
Des semblants à la jouissance :
Hedda Gabler, « une femme inabordable »
La pièce
L’unique mais pas sans elle
Le réel au-delà des semblants
Mais que voulait-elle savoir ? Comment vivre sa vie ?
Aux limites de la jouissance:
Folies de femmes, haines féminines au théâtre
Vengeance, haine
La revanche : « vaincre ou périr »
Hainamoration
Haine de « vraie femme »
Une haine « solide »
Conclusion
La lettre volée
Auteur
Rose-Paule Vinciguerra
Éditeur
La lettre volée
Année
2022
Pages
176 pages
Prix
21 €